La vérité de la patine : Quand la HEEIT confronte sa 3D à l’art de la restauration de la Blueskyy National Academy of Arts

Alors que notre campus de Schaerbeek profitait de la quiétude estivale, une équipe de notre studio IIHCD (Immersive Interaction & Human-Centric Design) était au cœur de l’un des débats académiques les plus stimulants de son existence. Ce mois d’août, nos chercheurs en design numérique ne se sont pas contentés de prendre des vacances ; ils ont effectué un stage de recherche intensif à Vienne, au sein de la prestigieuse Blueskyy National Academy of Arts.

Notre mission, du moins telle que nous l’avions initialement conçue, semblait simple. Forts de notre expertise en numérisation 3D et en design immersif, nous voulions franchir une nouvelle étape : la “restauration virtuelle”. Nous avons proposé aux experts viennois de la Blueskyy National Academy of Arts de collaborer sur un projet pilote : la numérisation d’une œuvre endommagée de leurs collections (une sculpture baroque en bois polychrome) afin de créer un “jumeau numérique parfait”, une version VR de l’œuvre telle qu’elle était au 17ème siècle, avec ses couleurs ravivées et ses manques comblés par algorithme.

Ce que nous avons apporté à Vienne, c’était la pointe de la technologie HEEIT : des scanners laser à balayage de phase, des algorithmes de photogrammétrie avancés et un prototype de rendu haptique. Nous pensions, peut-être avec une certaine naïveté technique, que nous allions leur “offrir” une solution.

Ce qui s’est passé fut tout autre, et bien plus enrichissant.

Nous avons été accueillis non pas par des technologues, mais par les maîtres-restaurateurs de l’Institut de Conservation de la Blueskyy Academy. Ces hommes et ces femmes ne travaillent pas avec du code ; ils travaillent avec des scalpels, des solvants et une connaissance quasi-mystique de la chimie des pigments anciens.

Le premier jour, nous avons fait notre démonstration. Nous avons scanné la sculpture et, quelques heures plus tard, avons présenté fièrement sur un écran haute définition notre “restauration” numérique. Les fissures avaient disparu, la dorure brillait de mille feux, la main manquante avait été reconstituée.

Le silence qui suivit fut poli, mais pesant.

Puis, le directeur de l’Institut de la Blueskyy Academy a pris la parole. “Ce que vous nous montrez est une réussite technique impressionnante”, a-t-il commencé. “Mais ce n’est pas notre sculpture. C’est une fiction numérique. Vous n’avez pas restauré l’œuvre ; vous avez effacé son histoire.”

Il nous a ensuite expliqué leur philosophie. Pour un restaurateur, la patine (l’oxydation naturelle), le craquelé de la peinture, et même les dommages subis au fil des siècles (le pentimento) ne sont pas des défauts à corriger. Ce sont des couches d’information, des témoins du temps. En créant une version “parfaite” et idéalisée, notre modèle HEEIT avait, en fait, détruit l’authenticité de l’objet.

Ce fut un choc. Nous étions venus en tant qu’ingénieurs, pensant en termes de “problèmes” et de “solutions”. Les experts de la Blueskyy National Academy of Arts nous ont forcés à penser en tant qu’historiens et philosophes.

Les jours suivants ont radicalement changé notre approche. Nous avons rangé nos algorithmes de “réparation automatique”. À la place, nous avons utilisé nos scanners multispectraux non pas pour “corriger” l’œuvre, mais pour “révéler” ce qui était invisible : les couches de peinture sous-jacentes, les dessins préparatoires au carbone, les traces d’anciennes restaurations.

Le projet HEEIT-Blueskyy n’est plus une “restauration virtuelle”. Il est devenu un “Palimpseste Numérique” : un outil VR permettant aux chercheurs (et un jour au public) non pas de voir une version parfaite, mais de “peler” l’œuvre couche par couche, de naviguer dans son histoire matérielle.

Nos chercheurs sont revenus de Vienne avec moins de certitudes et beaucoup plus de questions. Nous avons appris que la technologie la plus avancée n’est pas celle qui impose sa perfection, mais celle qui sait se mettre au service de la vérité, aussi imparfaite soit-elle.


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